Personnages célèbres Maxence Van Der Meersch"

Fils de bourgeois, il avait une fascination pour le peuple. Il connut la gloire de son vivant : le prix Goncourt en 1936 pour l'Empreinte de Dieu, son dernier best-seller Corps et Ames traduit en treize langues. Quarante ans après sa mort, Maxence Van der Meersch est presque tombé dans l'oubli. Pas une ligne sur lui dans l'Encyclopédia Universalis et deux seulement de ses romans encore disponibles en librairie. Pauvre Maxence. Comme Si a société littéraire parisienne lui rendait aujourd'hui encore tout le mépris qu'il avait pour elle.

Maxence Van der Meersch est né le 4 mai 1907 à Roubaix. Son enfance est marquée par la désunion de ses parents. Sa mère, alcoolique, finira par quitter le domicile conjugal. Et c'est par son père, dandy athée et libéral que le petit Maxence sera élevé et idolâtré. Elève brillant, il suit des études de droit.

En 1927, il tombe amoureux de Thérèze Denis, une jeune ouvrière qui vit dans un garni avec ses deux petites sœurs. Maxence s'installe avec sa concubine à Wasquehal. En 1929 Thérèse donne naissance à une petite fille, Sarah.

Le premier roman, La Maison dans la Dune est publié en 1932. En 1934, le jeune avoué est admis au barreau de Lille. Ses clients lui fournissent plus matière à roman qu'à brillantes plaidoiries. Car ils ne savent pas ce qu'ils font, Quand les sirènes se taisent (célèbre description des grèves ouvrières à Roubaix), le Péché du Monde, Invasion 14... Les romans se suivent et du succès d'estime, Van Der Meersch passe à la consécration. Pêcheurs d'hommes, roman sur la JOC, paraît au début de la guerre. En 1943, Corps et Ames, pamphlet contre la médecine se vend au marché noir. A la libération, il connaît des tirages énormes.

Maxence a toujours rejeté la société littéraire parisienne. A la capitale, il a préféré son Nord natal. Après la guerre, le romancier qui souffre d'insuffisance respiratoire élit domicile au Touquet. Il meurt le 14 janvier 1951 à l'âge de 43 ans. Affection pulmonaire pour certains, suicide diront d'autres... L'écrivain suivait un régime végétarien très strict et sa femme Thérèse confia à un ami "Nous luttions pour l'arracher à la mort, pour le faire manger; pour lui donner goût à la vie.."

En 18 ans d'activités littéraires Maxence Van der Meersch aura écrit 17 livres et de nombreux articles. A quand la réédition de ses œuvres complètes ?

E.D.

e A voir : les rues Ed. Anseele et du Pt Auriol (anciennement Rue des Longues Haies) à Roubaix où se déroule l'action de Quand les sirènes se taisent. Bruges pour Maria, fille de Flandre.

e A lire : La maison dans la dune, Van der Meersch, éd. LGF

- Quand les sirènes se taisent, Van der Meersch, Imprimerie nationale

- Revue Nord' n°15, mai 1990, Van der Meersch, romancier et travail.

 


Rien ne prédestinait Maxence Van der Meersch à écrire sur le monde ouvrier

Dans les années 5O, on ne lisait que lui

De son vivant, Sarah Van der Meersch, la fille de Maxence, avait failli étriper le docte universitaire Paul Renard, pour avoir révélé publiquement que son père était mort de tuberculose. La maladie dont souffrirent l'écrivain et son épouse, se soignait d'une manière qui nous paraît. Invraisemblable : pneumothorax (On cassait les côtes pour « libérer » le poumon) et suralimentation carnée. Puis vint la théorie, non moins renversante, du Dr Carton, dont l'aumônier des hôpitaux de Roubaix, l'abbé Pinte, était adepte : il fallait se sous-alimenter et vivre en ascète. Malgré l'influence du religieux, Maxence, qui avait « le moral plutôt gai et le goût de la douleur », ne se reprocha jamais sa littérature, ni son mariage. Alité dès 1947, il ne mena pas à terme son projet d'écrire une Invasion 40 comme il l'avait fait pour celle de 1914. Naguère ressentant quelque appétence pour Dieu, après 1947, il n'écrira plus rien de romanesque, se tournant vers des bondieuseries qui ne lui vaudront pas la bénédiction de l'évêché (Vie de Sainte-Thérèse de Lisieux, Vie du Curé d'Ars). Pas plus que le Masque de chair, confession-fiction d'un homosexuel, paru en 1958, après sa mort.

A tel point que Christian Morzewski s'interroge : n'est-ce pas plutôt le décès de son père qui stoppe le flot romanesque de Maxence van der Meersch ?

Celui-ci, flatté par le succès de son fils, avait fini par devenir son agent littéraire, allant jusqu'à faire rééditer certains ouvrages en pleine guerre, malgré la pénurie de papier. Le déclin de l'écrivain fut aussi rapide, selon Christian Morzewski, que sa popularité ; Maxence se rendit compte que tout changeait autour de lui. Le nouveau roman lui succéda.

Qu'en pense la génération actuelle ? Nathalie Coussement, jeune universitaire de l'Artois passionnée par sa région, aura l'honneur d'entamer jeudi matin le colloque avec son travail sur La Fille de fabrique de Van der Meersch : " Il faut lire son œuvre comme le témoignage d'une époque certes révolue, mais qui fait partie de notre patrimoine ". On l'a taxé de paternalisme, envers l'ouvrière surtout (« Toutes ces femmes, ces mères à l'usine, ces foyers où ne bout plus la soupe, où l'on mange beefsteak-frites et conserves, dont les gosses traînent dans les rues, et l'homme dans les cabarets, pendant que la femme attrape des métrites à piétiner au long d'un métier à bobiner ») alors qu'il ne voulait que protéger les femmes des abus du travail. « Ne lui collons pas d'étiquette », insiste-t-elle. Christian Morzewski ne dit pas autre chose : « Ne croyez pas que l'apologie de la femme au foyer soit automatiquement le fond de la pensée de Van der Meersch, même si derrière, il y a un fond de générosité ».

Ce paternalisme nous paraît choquant, aujourd'hui. Et l'image de la femme, alors ? « Elle est capable du meilleur comme du pire, dit Nathalie, à la fois glorifiée et dégradée par l'écrivain, vierge et putain, active ».

« Instrument de tentation, de déchéance et de rédemption de l'homme, elle se rachète », surenchérit le professeur. Est-ce bien cela, l'ambiguïté ? Pas dépassé, en tout cas !

DB.


Colloque à Wasquehal (Nord / France)

Sur les pas de Van der Meersch

Le 14 janvier 1951, Maxence Van der Meersch disparaissait. La salle Gérard-Philipe de Wasquehal accueille ce samedi le troisième volet d'un colloque organisé par l'université d'Artois, et consacré à l'écrivain. Thérèse Bonte, présidente de la Société des amis de Maxence Van der Meersch, sise à Bondues, entamera cette troisième journée du colloque intitulé Ecrire le Nord, écrire le monde, par une intervention consacrée à la dernière année de la vie de l'auteur.

L'après-midi sera l'occasion d'un circuit-promenade A la trace de Van der Meersch, sur les sites de la vie et de l'inspiration de Maxence, à travers Wasquehal mais aussi Roubaix, Mouvaux et Tourcoing.

Dimanche 14 janvier 2001, cinquante ans jour pour jour après sa disparition, la Société des amis de Van der Meersch organise une journée entièrement dédiée à l'écrivain pour commémorer cet anniversaire. Elle débitera à 10 h par une messe, à Mouvaux. La messe sera suivie d'une visite au cimetière de Mouvaux, où l'auteur est enterré au côté de sa seconde fille. Dans l'après-midi, trois films seront projetés au Fort de Bondues, retraçant la vie de Van der Meersch, mais aussi le téléfilm, Maria, fille de Flandre.

Université d'Artois, UFR de lettres : 03.21.60.38.26.

Société des amis de Maxence Van der Meersch.

mairie de Bondues, 03.20.25.94.94.


Dans les pas de Maxence Van der Meersch

   

Il est possible de poursuivre par un pèlerinage sur les lieux où vécut notre Prix Goncourt 1936.

Avant de pénétrer dans l'hôtel de ville de Wasquehal (59), on ira voir, face à celui-ci, le buste récemment inauguré et réalisé d'après un plâtre d'André Missant (1908-1977). D'évidence, les sensibilités de l'artiste et de son modèle étaient proches...

L'exposition présentait deux toiles peintes par Missant et figurant l'une Maxence et l'autre sa femme Thérèse, l'ouvrière du textile évoquée dans Car ils ne savent ce qu'ils font et dans la trilogie de La Fille pauvre, du mobilier et des bibelots ayant appartenu à Maxence et à sa fille Sarah, en particulier la collection de sulfures de cette dernière. Sur des panneaux était rappelée la carrière du brillant élève qui fut d'abord avocat avant de se vouer rapidement et exclusivement à sa vocation d'écrivain.

Des vitrines abritaient des éditions des œuvres de Maxence, en France et à l'étranger ; les plus remarquables étant celles réalisées par Le Moulin de Pen-Mur. Etaient rassemblées des photographies et des manuscrits. Ceux-ci révèlent, à travers l'élégante et incisive écriture, le tempérament de l'auteur. Ils nous apprennent beaucoup sur sa méthode de travail : fiches établies lors de la mise en chantier d'un roman, tantôt au dos d'une étiquette de vin ou d'un quelconque document publicitaire ; premiers jets, raturés, écrits à la diable ; frappes à la machine faites par Thérèse. Trois dessins originaux de Simons sont dédicacés par l'artiste à Maxence et à Sarah. Deux d'entre eux, sinon les trois, semblent avoir été faits pour illustrer Quand les sirènes se taisent : l'un représente les gamins de la rue des Longues-Haies et l'autre la queue des grévistes pour la distribution de pain au local du syndicat sous des parapluies formant " comme une carapace aux écailles bombées ".

Après la visite, pourquoi ne pas aller, au n° 7 du Quai des Alliers, à Wasquehal, voir la maison du canal où Maxence et Thérèse habitèrent après 1936 ? A deux pas, au n° 246 de la rue Lamartine de la même commune et au n° 82 de la rue de Wasquehal à Mouvaux, sont deux maisonnettes où Van der Meersch vécut auparavant.

De l'autre côté du canal, à Roubaix, c'est au n° 76 de la rue Cuvier que Maxence naquit; au n° 62 de la rue de l'Epeule qu'il passa les années 1912-1924 ; à l'école de la rue Brézin qu'il usa ses fonds de culottes ; c'est au n° 6 de la rue Favreuil que son père eut son entreprise de matériaux et au n° 9 que sa mère tint café. Malgré les changements, on saura re-découvrir là cette " grandeur sombre des faubourgs de nos villes industrielles " qu'il décrivit Si justement et l'on comprendra mieux l'œuvre.

Texte rédigé d'après l'écrit de Michel MARCQ

A lire, de Van der Meersch, chez Omnibus,
sous le titre Gens du Nord, La Maison dans la dune,
Quand les sirènes se taisent, Invasion 14,
l'Empreinte du Dieu et La Fille pauvre
(135 F)
dans Le Livre de poche Corps et Ames et Pêcheurs d'hommes.

Sources Voix du Nord