Personnages célèbres "Jeanne et Marguerite de Flandre"

JEANNE DE FLANDRE

La bonne comtesse

Les amateurs d'exactitude sont quelque peu déconcertés pat les imprécisions entourant l'état-civil de la comtesse Jeanne non seulement les spécialistes hésitent, pour sa naissance, entre 1188 et 1200, mais elle est aussi connue sous deux titres : comtesse de Flandre et de Constantinople. Cette étrangeté provient de son père, le comte Baudouin IX de Flandre qui, au cours de la quatrième croisade, est élu par ses pairs empereur de Constantinople. Il disparaît quelques mois après, en Bulgarie, laissant une veuve (qui meurt peu après) et deux orphelines. Jeanne, l'aînée, hérite des titres de son père et du comté de Flandre.

Elle est prise en charge, Marguerite, par un redoutable tuteur, le roi de France Philippe-Auguste qui les abrite au Louvre où, certes, elles sont fort bien traitées, mais constituent de véritables otages. Le roi compte renforcer son, emprise en mariant Jeanne avec l'un de ses fidèles, Ferrand de Portugal, ce qu'il réalisa fin 1211.

Le résultat ne correspond pas à son attente Ferrand, gravement humi1ié par le fils du roi à Péronne, s'allie ; aux ennemis de Philippe-Auguste, ce qui débouche sur la bataille de Bouvines, le 27juillet 1214. Ferrand, vaincu, est emmené à Paris pour une sévère captivité de douze années.

Durant cette difficile période, Jeanne, bien conseillée par sa belle-mère, assure au mieux la direction du comté, faisant face à l'agitation de la noblesse et des cités, et surtout au douloureux épisode du faux Baudouin, un ermite mythomane, ancien jongleur, qui, profitant habilement du mystère entourant, la mort de Baudouin IX, réussit à persuader qu'il était le sauvé. Il soulève une véritable sédition grâce à la complicité, plus ou moins de bonne foi, de quelques villes et de nombreux seigneurs. L'imposteur, démasqué, est exécuté, mais le roi de France doit participer au rétablissement de l'ordre.

Un gouvernement généreux

La comtesse Jeanne finit par obtenir la libération de Ferrand, en 1226. Le couple a quelques années de relative tranquillité, consacrées à une sage administration, avec, entre autre, la fondation de nombreuses institutions charitables ou religieuses. Une petite fille, Marie, naît alors.

Le comte Ferrand meurt en 1233, bientôt suivi dans la tombe par la petite Marie. L'accumulation de ces malheurs n'aigrit pas Jeanne. Bien au contraire, elle est renforcée dans Sa volonté de gérer au mieux son domaine : c'est réellement la " bonne comtesse " qui exerce son action dans deux orientations privilégiées. Responsable politique, elle favorise l'autonomie communale et, l'accroissement du rôle des habitants des villes dans l'exercice du pouvoir local la charte de Lille, en 1235 en est un bon exemple.

Egalement, elle est à l'origine de plusieurs institutions hospitalières qu'elle dote généreusement : Saint-Sauveur et l'hospice Comtesse à Lille, l'hôpital d'Orchies, plusieurs, béguinages en sont les manifestations les plus notables.

Elle décède en 1244 à l'abbaye de Marquette, une de ses fondations, où elle est inhumée. C'est à juste titre que le CHR de Lille a décidé d'attribuer le nom de cette bienfaitrice au très récent hôpital de la mère et de l'enfant qu'il a édifié.

par le Dr Alain GÉRARD

Source Voix du Nord

 

MARGUERITE DE FLANDRE

Fonde l'hôpital de Seclin

1996 marquera le 750e anniversaire de l'hôpital de Seclin, créé par Marguerite de Flandre. Un bâtiment remarquable et une bienfaitrice qui ne l'était pas moins…

 D'AUCUNS prétendent que Marguerite, comtesse de Flandre, fille de Baudoin IX (éphémère empereur de Constantinople à l'issue de la 4e croisade), crée en 1246 un hôpital (à l'époque une institution religieuse) pour faire pénitence de certaines mauvaises actions. Notamment celle d'avoir épousé en premières noces un homme d'Église. Une existence longue pour l'époque - la comtesse naît en 1202 à Valenciennes et s'éteint soixante-dix-huit ans plus tard, et mouvementée en raison de ses problèmes matrimoniaux et familiaux. Marguerite est sœur de Jeanne (qui crée à Lille l'établissement qui prendra le nom d'hospice Comtesse), celle-ci mariée à Ferrand de Portugal " déconfit " à Bouvines par le roi de France Philippe Auguste en 1214.

Marguerite se marie une première fois à 10 ans, avec un certain Bouchard d'Avesnes, diacre de son état. Jeanne fait invalider cette union quelques années plus tard, furieuse que Bouchard ose lui réclamer en dot une partie de son domaine. Marguerite voit son mariage annulé avec cet homme dont elle a eu deux enfants. Elle prend en secondes noces Guillaume de Dampierre, qui lui donnera cinq nouveaux enfants. Entre ses deux lignées, Marguerite va "opter " pour la seconde, et nourrir bientôt les sentiments les plus haineux envers la première. En effet, ses deux progénitures se mêlent de politique, et revendiquent chacune la plus grande part du gâteau les Avesnes et les Dampierre se disputent les couronnes de Flandre et de Hainaut. " Crimes, exactions, pillages se succèdent dans la pauvre province [du Hainaut] victime expiatoire de Marguerite "la Noire", pourtant portée aux nues en Flandre où elle est la "bonne comtesseA. Merk, membre de la Commission historique du Nord, cité dans « Le Journal de Marguerite », journal du 750e anniversaire de la fondation de l'hôpital de Seclin." .

C'est dans ce contexte de violence que Marguerite (comtesse de Flandre depuis la mort de sa sœur Jeanne) décide la création de l'hôpital de Seclin, à l'emplacement probable d'une ferme qui lui appartient.

Pour Stéphane Révillion, responsable du Centre archéologique de la commune, " cette fondation paraît justifiée à Seclin par la proximité de plusieurs établissements religieux importants. Depuis VIIe siècle, le culte des reliques de saint Piat attire de nombreux pèlerins et malades au centre de la ville, dans la collégiale (...). Le voisinage de la puissante abbaye Saint-Christophe à Phalempin exerce aussi une certaine influence ".

Marguerite accorde à son établissement des biens fonciers, ainsi que des rentes qui perdureront jusqu'à la Révolution. L'hôpital est confié à des religieuses de la communauté de Saint Augustin.

" Comme les autres hôpitaux de cette époque, l'établissement de Seclin devait comprendre une grande salle avec un autel à l'une de ses extrémités (cette disposition permettait aux malades de suivre la messe), et un logis contigu pour les religieux. Pendant tout le Moyen Age et le XVIe siècle, les bâtiments subissent de nombreux dégâts à chaque passage de troupes ; cela explique la disparition à peu près totale des premières constructions. Jean Louart, Revue du Nord n°141, janvier-mars 1954."

En revanche, les bâtiments élevés à partir du début du XVIIe siècle subsistent. Consolidés par des travaux aux siècles suivants, ils constituent aujourd'hui la plus grande partie de cet ensemble imposant, mais en même temps plein de finesse et de sérénité.

L'hôpital Marguerite de Flandre abrite de nos jours des personnes âgées. Il constitue un édifice qui gagne à être connu et apprécié. Le 750e anniversaire de sa fondation en fournit l'occasion rêvée.

 ?La commune de Seclin a célébré dignement au cours du mois de juin 1996 cet anniversaire. Au programme : expositions, festival de musiques anciennes, messe commémorative et conférences à caractère spirituel, etc.

Source Voix du Nord et Journal "Le Nord" du CGN