Personnages célèbres "Alphonse Deneuville et Alfred Mongy"

ALPHONSE DENEUVILLE

Le peintre qui a transcendé la défaite

La peinture militaire, après avoir connu un succès triomphal au siècle dernier, est tombée dans un oubli méprisant. Elle sort maintenant du purgatoire et c'est justice, car cette forme d'art offre au moins deux intérêts : elle rend compte de sentiments qui furent des faits de société et elle comporte un aspect documentaire extrêmement précieux pour l'historien.

De plus de nombreux peintres militaires ont un très réel talent ; tel est le cas d'Alphonse Deneuville, né à Saint-Omer en 1835. Ce fut un peintre " sage ", bien éloigné de la vision traditionnelle des rapins chahuteurs et à la vie sentimentale débridée.

Son père honorable commerçant, souhaitait que son fils soit avocat : celui-ci, obéissant, s'inscrit à la faculté de droit de Paris, mais suit simultanément des cours de dessin et de peinture auxquels il donne sans doute la priorité puisqu'il accomplit de rapides progrès dans ces domaines. Très vite le jeune artiste prend l'orientation militaire qui lui assure le succès : il obtient une première récompense avec les sujets guerriers qu'il présente au Salon de 1859.

Mais, bien plus que les faits d'armes victorieux de Crimée et d'Italie, c'est paradoxalement la désastreuse suite de combats de 1870-1871 qui lui fournit les sujets des toiles le couvrant de gloire. Nous ne prendrons qu'un seul exemple parmi les dizaines d'œuvres à l'origine d'un succès qui ne se dément pas jusqu'à la fin de sa vie : " Les dernières cartouches ", tableau proposé au Salon de 1873. L'enthousiasme déclenché par cette œuvre (achetée 120000 F soit plus de 2 millions de francs actuels) est indescriptible : un nombre prodigieux de reproductions est diffusé dans toute la France et l'artiste reçoit la Légion d'honneur.

Cet engouement s'explique par l'atmosphère d'héroïsme résolu qui se dégage de la représentation d'un fait militaire très simple : une petite troupe contrainte à la reddition par l'épuisement de ses munitions. De Neuville - il anoblit son nom, ce qui cadre bien avec son allure distinguée et le somptueux train de vie que lui permettent ses gains - sait faire passer à travers ses tableaux les émotions qui font oublier aux Français qu'ils ont été vaincus en 1871. D'où une admiration, au demeurant justifiée par la qualité de sa peinture.

Il meurt en 1885, épousant au dernier moment la très belle actrice avec laquelle il a toujours vécu, une de ses rares fantaisies. Ses funérailles furent grandioses et sa tombe superbe. Mais il y a plus : sa ville natale et le musée Sandelin n'ont jamais oublié le souvenir de cet artiste de talent.

Source Voix du Nord

 

ALFRED MONGY

Créateur du Grand Lille

Il y a une vingtaine d'années, le nom de " Mongy " était un des plus familiers aux habitants de l'agglomération lilloise. Le " Mongy ", moyen de communication très utilisé par les Lillois, Roubaisiens, Tourquennois ou autres, était devenu une dénomination commune et l'on surprenait les utilisateurs en leur apprenant qu'il s'agissait là du nom de l'ingénieur lillois à l'origine de cette réalisation.

Né en mai 1840 au cœur du Lllle ancien, dans une famille modeste, le jeune Alfred est un élève brillant qui, entré à 19 ans dans les services municipaux de sa ville natale, y fait une carrière réussie : en vingt ans il devient chef de l'important service des travaux municipaux. Il assume le travail considérable imposé par l'agrandissement de Lille, décidé en 1858. Puis, les lois sur l'instruction obligatoire et l'implantation lilloise des nouvelles facultés nécessitent la construction d'un nombre considérables d'édifices publics : écoles, instituts, bâtiments universitaires. Leur solidité peut toujours être constatée. Il prend également en charge la restauration de ta porte de Paris, alors fort délabrée.

En 1896, à l'arrivée de ta municipalité Delory, il quitte la mairie, laissant une œuvre impressionnante. Après quatre années passées dans les services préfectoraux, il commence une nouvelle carrière indépendante, mais tout aussi réussie que ta première. Il s'est toujours intéressé aux tramways et a de vastes projets dans ce domaine. Il n'en réalisera qu'une partie, mais celle-ci, fort importante, est toujours d'actualité : la percée du grand boulevard réunissant Lille, Roubaix et Tourcoing. Le gigantisme du projet fait peur et, Si le Conseil général le soutient, tes municipalités sont plus réticentes et craignent la largeur excessive des voies et chaussées. De plus, il y a le problème de la traversée des fortIfications de Lille. Tout ceci est habilement négocié et le boulevard, large de 50 m ; est inauguré, avec les rutilantes et confortables voitures du " Mongy ", le 4 décembre 1909.

Le succès de cette réalisation se confirme au fil des années et même. Si le nom du créateur est maintenant supplanté par celui de " Transpole ", le principe de son tramway demeure.

Alfred Mongy, lui, meurt à la veille de la guerre mondiale, en juin 1914 : un chapitre de l'histoire de Lille se clôt.

par le Dr Alain GERARD

Source Voix du Nord